Réflexion en passant

Qu’est que l’art ?
On entend souvent dire qu’il n’existe pas de définition du mot « art ». Est il possible qu’un mot n’ait pas de définition ?
Les hommes ont créé les mots pour penser. Ils sont reliés à une réalité explicable, quelle est celle du mot « art » ?
Il nous vient du latin « ars » ou « artis ». Nous apprenons à la lecture de Cicéron au premier siècle avant J.C. qu’il désigne le savoir faire ; l’habileté ; le talent ; le lien entre « artiste » et « artisan ». Nous savons que Piero Della Francesca se considérerait et était considéré par ses contemporains comme un artisan ; on peut supposer qu’il en fut ainsi pour tous les peintres du Quattrocento, d’ailleurs ils travaillaient dans des ateliers à plusieurs sur une même toile, à la manière des artisans. Bien des peintres ont suivit cet état d’esprit, je rappelle que Renoir se présentait comme un « ouvrier de la peinture » et exécrait le terme « artiste » ; de même pour Balthus plus récemment. Le mot « artiste » apparait dans la Divine Comédie au XIVe siècle, Il semble être utilisé comme titre honorifique pour désigner une personne ayant porté son savoir-faire vers une individualité accessible pour lui seul (un poète dans le cas présent). Nous pourrions par exemple dire que les peintres sont des artisans mais que certains d’entre eux sont considérés comme artistes car ils se démarquent de l’ensemble. Sous cet angle, se dire artiste semble prétentieux ; mieux vaut se présenter comme artisan (celui qui exerce un savoir-faire) ou plus simplement comme peintre, sculpteur, compositeur, etc.
La définition de l’art serait alors : un savoir-faire porté à un niveau dépassant le commun.
Nous dirions donc : l’art de la réthorique ; l’art de la menuiserie ; l’art de la cuisine… cela serait-il possible pour l’intégralité des activités ?
Je remarque que trois de ces catégories se distinguent des autres par quelques faits : la peinture, la sculpture et la musique.
Ces trois là ne correspondent, à priori, à aucun besoin de l’homme. Pourtant l’homme les pratique depuis toujours (en tout cas -35 000 ans pour la sculpture et -31 000 ans pour la peinture) et dans toutes les cultures, ce qui caractérise normalement les besoins naturels (ils sont de tout temps et en tous lieux). On peut donc supposer que ces activités sont essentielles à l’être humain.
Toujours dans la même direction : Les enfants, à un stade ou la conscience est encore peu présente chez eux, s’adonnent naturellement au dessin, au modelage et aux vocalises. Sans aucune technique évidement, ce qui nous fait penser qu’ils font parfois de l’abstraction. Mais le but est toujours figuratif et harmonieux, ils cherchent à représenter quelque chose de précis (maison, animal…) par le modelage et le dessin, et un sentiment par la musique.
Je découvre dans l’Histoire de la Pensée de Lucien Jerphagnon que les Grecs de l’Antiquité définissaient l’art (musique, sculpture, peinture) comme la représentation d’un monde en miniature. Je constate que cette définition se rapproche de beaucoup de celle de la culture chinoise concernant sa propre peinture. Je différencie l’esprit de ces cultures de celui de la notre par la tendance a moins compartimenter les catégories. C’est l’idée que l’univers dans son ensemble se concentre dans la plus petite de ses parties. Chardin a représenté l’univers dans son gobelet d’argent, Monet dans ses paysages, Vermeer dans son atelier et il y a des foules dans les portraits de Velasquez.
Et qu’en est-il du graphisme ? Artiste ou artisan ?
Pour nous, c’est artisan sans aucun doute !